dimanche 18 mars 2012

Moog voyager - "on my pillow"



Meeeeooooww... 'Ferais bien une sieste, moi.

Entièrement joué sur un Moog Voyager, composé par CLS516

vendredi 16 mars 2012

Moebius


Extrait du Garage Hermétique, une aventure du Major Fatal - et l'une de mes planches préférées.

Moebius a marqué mon adolescence de manière indélébile et je lui dois, à l'époque où je m'échinais à ne jamais devenir dessinateur de bédé, d'innombrables questionnements graphique et "scénaristique" intenses. Parmi d'autres : que peut bien signifier « Le Garage Hermétique » ? Pourquoi tel  personnage change-t-il de bouille au détour d'une page ?
A l'époque, internet n'existait pas et, loin de la capitale et de ses libraires spécialisés, il fallait bien des copains aussi barrés que soi pour partager ces séances de sourcils froncés. Avant de se convaincre que le plus intéressant était de prendre le crayon et de copier, s'inspirer, copier encore ce drôle de génie : le trait ferait sens, à défaut de l'histoire. Evidemment Olivier et Bruno, vous faisiez partie de ces copains là.

Le premier et plus grand choc fut  L'Incal, principalement les 2 premiers tomes - le 3e est une course poursuite rythmée de métamorphoses, et ensuite ça se gâte. Je me les offris dans une version collector, en coffret et en noir et blanc, le meilleur moyen de ne pas se laisser distraire par la superbe mise en couleurs d’Yves Chaland. Je me penchai alors sur le dessin changeant de Moebius, son modelé au trait singulier qui devait inspirer toute une génération de dessinateurs, son irrégularité aussi, tant la liberté un peu foutraque semblait parfois lui tenir lieu de ligne de conduite. Moebius était la cour de récré de Jean Giraud, une cour dont le sur-gé aurait disparu, le temps de quelques planches. Presque aussi "baroque", le scénario de Jodorowski le maintenait toutefois sur la route d'un récit bien garni de rebondissements haletants. Sans aucun doute la bédé que j'ai le plus relue.

Ensuite vint l'Intégrale en plusieurs volumes parue aux Humanos, où je découvris des univers  inconnus de la bande dessinée, inconnus au jeune ado que j'étais alors. Arzach, le Major Fatal, les dessins X...
Combien d'heures ai-je aussi passé à reproduire les "sketches" produits pour le cinéma, Dune, Tron et Alien en tête ? Costumes, vaisseaux… Là encore, son influence fut déterminante pour une lignée de metteurs en scène formés dans les écoles d'art d'Angleterre ou des USA.

C'est en revanche à toi Olivier que je dois la rencontre avec Blueberry. La monumental "Ballade pour un cercueil" m'avait emporté sans retraite possible dans les tourbillons, les bouillonnements de sa crue inspirée. Quelle noirceur ! Quelle densité ! Angel Face m'avait aussi fait une semblable impression - comment oublier la dernière case, si brutale ?

Moebius, je l'ai perdu de vue dans les années 90, quand il a intégré durablement la mouvance New Age. Tout ce cosmo-bordel à base de cristaux qui causent, de mysticisme bariolé ne me parlait plus. La seule fois que je vis le bonhomme, en chair et en os,  fut d'ailleurs lors d'une de ces "conférences" données par Jodo à Jussieu, un soir d'hiver. Du grand n'importe quoi, où le scénariste avait fait descendre son fils sur l'estrade pour le masser devant un amphi dont je n'ai jamais su la part de curiosité distante et de franche adhésion. Je n'osai déclarer au grand Gir l'admiration que je lui avais portée. Il faut dire que, de plus en plus dépouillé, pour ne pas dire dénudé, le dessin de Moebius ne me séduisait déjà plus. 

Alors, que me restera-t-il de Moebius ? D’immenses souvenirs de lecture à la lueur de la lampe torche et, plus important encore, de passion partagée. C'est déjà beaucoup. 

jeudi 1 mars 2012

Ladyhawke in Black, White and Blue

Enfin !
Album dans les bacs - ah, ah, ah - black, white and blue ! - le 26 mai.


Mon coeur bat pour Borgen

Il faut une sacrée dose d'humour pour me proposer chaque jour, comme pub sur ma boîte aux lettres online, un défibrillateur, pile l'année de mes 45 ans. 
Autrement, dit l'âge auquel mon père est mort d'un infarctus.

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Ce soir, c'était Borgen sur Arte. La série décrivant les menus et grands combats du premier ministre danois, une centriste parvenue au sommet un peu par accident. 
Dépourvu de téléviseur, j'ai raté deux épisodes de cette série danoise super extra, dont le doublage est hélas la catastrophe habituelle. Tout de même, le jeu de Sidse Babett Knudsen  porte tête haute, et presque à elle seule, la série sur les chemins de l'excellence. Il suffit de quelques regards, quelques attitudes pour comprendre combien cette actrice est une grande. Enfin moi, je suis convaincu. Pour un peu, je voterais au centre... 

dimanche 26 février 2012

Les Chronolithes, de R.C. Wilson


C’est quoi ? Les Chronolithes, de Robert Charles Wilson - Denoël/Folio SF

De quoi ça parle ? Scott Warden était là à Chumphon, Thaïlande, quand le premier chronolithe est apparu : un obélisque de plus de cent mètres de haut, d’un bleu impossible, gelant un paysage de jungle dévasté ; un monument commémorant une victoire, celle du seigneur de la guerre Kuin, victoire qui n’aura lieu que dans vingt ans et trois mois. Mais qui est Kuin ? Un tyran, le sauveur d’une humanité à la dérive, un extraterrestre aux traits indubitablement asiatiques, un futur dirigeant chinois, une rumeur qui, grâce à la turbulence Tau, deviendra réalité ? Et que sont réellement ces chronolithes qui ravagent le monde ? C’est à toutes ces questions que Scott et son ancien professeur de physique, Sulamith Chopra, devront répondre, non sans avoir à parcourir le globe, de Chumphon à Jérusalem, du Mexique au Wyoming. Après Darwinia, voici le second roman de Robert Charles Wilson dans la collection Lunes d’encre, un thriller temporel comme vous n’en avez jamais lu, qui a valu à son auteur une nomination méritée au prestigieux prix Hugo (présentation de l’éditeur).

C’est comment ? Un événement mystérieux et de grande ampleur, aux limites du cataclysme et dont l’écho se répercute durant plusieurs décennies. Des mouvements sectaires émergeants et millénaristes qui s’emparent du phénomène. Une humanité au bord d’une crise majeure, tant politique que sociale et économique. Un narrateur au cœur de cette énigme, impliqué presque malgré lui, offrant un compte rendu précis des incidents à l’échelle mondiale mais aussi - surtout ? - à hauteur d’homme, de son expérience quotidienne, des bouleversements que le mystère induit dans sa vie personnelle… Difficile de ne pas voir dans Les Chronolithes un « système Wilson », voire la répétition générale du chef d’œuvre qui paraîtra 4 ans plus tard : Spin. S’il n’atteint pas la maîtrise de ce dernier, les Chronolithes s’avère passionnant de bout en bout. Le thème du paradoxe temporel sert ici la cause philosophique du libre-arbitre. Encore un thème cher à Wilson : que peut-on faire de sa vie quand cette dernière semble entraînée vers une proche apocalypse ; faut-il baisser les bras, rejoindre les troupes grossissantes des fanatiques religieux et éperdues de rédemption sanglante, ou bien doit-on tout mettre en œuvre individuellement pour repousser l’inéluctable, voire le modifier ? Une forme de résistance, dont l’auteur – et son narrateur – s’empare, sans héroïsme grandiloquent mais avec intelligence, humanisme et une forme d’optimisme mélancolique – Wilson n’écrit pas des romans gais et ses personnages sont hantés par la tentation de l’échec, de la culpabilité. Tout comme dans Spin, on n’échappe pas à de fréquents rappels de « hard science ». Tant mieux : ils ancrent le récit dans un certain réalisme. Mais l’humain demeure toujours au centre d’une intrigue aux allures de thriller, où les révélations se succèdent up tempo.
Une lecture indispensable.

Boss


Planté au beau milieu d’un entrepôt désolé, un certain Tom Kane écoute sans broncher la litanie de symptômes qui l’attendent. Il lui reste cinq ans à vivre. Cinq années d’une lente descente aux enfers, où son corps l’abandonnera peu à peu, où sa mémoire se diluera dans les affres d’une maladie dégénérative. Le médecin, tenu au secret, quitte les lieux. Quinqua à la mâchoire carrée, le malade encaisse la nouvelle avant de s’effondrer une fraction de seconde et de se reprendre illico. Parce qu’il ne laissera pas tomber, Tom Kane, il ne lâchera rien, ne dira pas un mot sur la faiblesse majeure qui l’accablera d’ici peu. Ce n’est pas son genre. Il est maire de Chicago.
L’heure qui suit dresse le portrait d’un homme sans concession, leader manipulateur et violent, agrippé aux rênes de sa cité. Autour de lui, une éminence grise qui ne s’émeut pas de ses coups de gueule ; une assistante aussi glamour qu’improbable ; une épouse vouée au caritatif, glaciale, déterminée, aussi attachée au maintien de l’équipe municipale que détachée de son mari. Plus loin, mais tout près, une fille assistante sociale, prêtre et junkie ; elle passera le pilote à jouer au chat et à la souris avec daddy. On flaire les comptes à régler, le schéma du père accaparé par son métier, oublieux de ses gosses. Toutefois Boss met très vite les mains dans le cambouis politicard : derrière le discours méritocrate, les références émues aux pionniers se cache avec la discrétion d’un évêque dans un peep show toute la violence d’un édile lié aux mafias. Relation symbiotique volontaire ? La force de ce 1er segment est de ne pas prendre parti : faire tourner la boutique exige ces compromissions et on ne saura pas qui de l’ambition personnelle ou du service dû au public motive Tom Kane.
Quant à la métaphore médicale qui fonde la série, elle n’est certes pas très fine : la dégénérescence de l’homme comme de la cité est inéluctable et elle sera dévastatrice. Ok pour le message. Ce qui ne l’empêche pas d’être prometteuse : le voyeur qui sommeille en chacun de nous guette avec gourmandise les premiers symptômes, a fortiori leur manifestation publique. Reste à éviter le risque du bégaiement, de la redite. La brutalité uppercut, elle, a des airs de Scorcese et on prend la mouche un peu vite, sur les rives du lac Michigan. En fait, c’est tout le projet qui avance sur la corde raide : d’un côté le drame politique et la mise en image du pouvoir et de ses rouages, si elle n’est pas nouvelle, passionne ; de l’autre, les affres intimes de chaque protagoniste, les relations et leurs conflits pour l’heure esquissés sont trop clichés pour captiver : pas difficile de deviner où le scénario compte nous entraîner, du moins dans ses 1ers épisodes. Quant aux minorités de la 3e ville des USA, elles y sont souvent représentées avec une paresse qui frise l’insulte : les jeunes Noirs sont dealers, les Latinos sont de grandes gueules, les Indiens ne pensent qu’à la paix des Grands Anciens.
Co-producteur de cette série écrite par Farhad Safinia (qu’il ait co-écrit Apocalypto en dit long sur le rapport entre pouvoir et violence de Boss) van Sant délivre une réalisation elle aussi paresseuse, toute entière caméra à l’épaule - pour l’effet de réel sans doute. Exceptions notables : quelques gros plans bien choisis, une scène de sexe clipesque entre l’assistante - une survivante de la série teen Beverly Hills - et le challengeur du gouverneur, un beau gosse qu’on peine à imaginer dans ce rôle de prédateur. C’est que le casting est inégal et tente de se faire une place à l’ombre d’un immense Kelsey Grammer, impeccable dans le rôle titre, d’un crédible Martin Donovan, bras droit de mr le Maire. A eux deux ils sont la très belle surprise d’un pilote punchy, particulièrement bien monté, intrigant et prometteur malgré des poncifs pas toujours de très bon goût.

Replay


Replay, de Ken Grimwood - Point Seuil

Comme si souvent avec les thrillers, il s’avère bien difficile d’évoquer le récit sans dévoiler les moments clés de l’intrigue. Alors comment donner envie et partager le plaisir de lecture avec ses proches sans tout gâcher ? 

Sachez déjà que dans Replay, le narrateur, un journaliste radio un peu aigri, meurt d’une crise cardiaque à 43 ans. Ça lui prend à son bureau, alors que sa femme est à l’autre bout du film. Mais la mort n’est pas une solution viable, dans Replay. Notre héro se réveille donc dans sa chambre d’étudiant en 1963, à l’âge de 18 ans. Dès qu’il a compris et accepté cette situation parfaitement insolite, il décide d’en tirer avantage, quitte à remettre aux calendes grecques la recherche de la vérité. Ne connaît-il pas l’avenir comme personne autour de lui ? Il parie donc sur quelques courses de chevaux dont il a conservé le souvenir, des grands prix de légendes à l’issu inattendue, du moins pour le parieur moyen de l’époque. D’une course à l’autre, puis d’un match de base-ball à l’autre, Jeff engrange un petit pactole, avec la complicité de son co-turne. Lequel, bien sûr, ne cesse de s’étonner des performances hors-normes de cet ami bien mystérieux, pour ne pas dire inquiétant. 

Mais les paris sportifs, c’est sympa pour l’adrénaline, un peu moins pour s’assurer un avenir sous le soleil. D’autant plus que dans ce domaine, ses souvenirs s’assèchent vite. Jeff dès lors investira dans les sociétés industrielles qu’il saura promises à un avenir radieux - Apple, ça vous dit quelque chose ? 
Voilà pour l’aspect pratique de son aventure. L’auteur la mène avec maestria et un certain sens du détail qui crédibilise l’invraisemblable. Mais le plus saisissant n’est pas là : si notre aventurier malgré lui n’a rien oublié de son passé, il n’a pas non plus tiré un trait sur la femme qu’il a aimée avant de mourir, certes provisoirement, d’un infarctus. La (re)conquérir va s’avérer plus compliqué que d’emporter la mise sur une course hippique. D’ailleurs, cela est-il seulement souhaitable ? Avec la chance étrange qui lui est offerte Jeff réinvente sa vie affective et conjugale : pourquoi réitérer les mêmes erreurs ? 
Tout irait bien dans le meilleur des mondes revécus si seulement la mort ne survenait une fois de plus à 43 ans, à la même heure exactement, et ne renvoyait notre bonhomme plus de vingt ans plus tôt, à l’état d’étudiant. 
Retour à la case départ, donc. 
Sauf que cette fois, Jeff n’a pas le sentiment d’avoir vécu à côté de ses pompes. Bien au contraire : sa seconde vie - son premier replay - a été si riche, si féconde, si bien menée et si enthousiasmante qu’en perdre soudainement les fruits est une déchirure d’une cruauté telle que Jeff peinera à s’en relever. 
Car tout est effacé, à part dans sa mémoire. La femme qu’il a aimé ? Elle ne le connaît plus. L’enfant qu’il a eu ? Il n’existe pas. Les entreprises florissantes qu’il a montées ? Du vent. Tout est à refaire, à reconstituer. Mais comment s’y prendre lorsque l’on est plus le même homme, lorsque l’expérience ne permet plus de lire son existence avec un œil neuf, lorsque s’impose le pressentiment que tout cela va, une fois encore, être voué à disparaître ? Car combien de replay vont-ils se jouer de lui, moquer ses efforts ? Une infinité ? Ou bien sera-ce le dernier ? 

Sachez encore que l’auteur évite tous les pièges inhérents à son histoire : alors que le gimmick menaçait de créer la répétition de mêmes scènes un peu décalées, Grimwood prend à chaque replay des chemins radicalement différents. Une thématique geek donne même une épaisseur nouvelle au récit – et accessoirement a dressé les cheveux sur la nuque de votre serviteur. Quant à l’intrigue affective – à laquelle la thématique suscitée est intimement liée – elle prend bientôt une dimension qui laisse le lecteur sur la brèche. Le suspense naît peu à peu de la menace qui pèse sur le héros : comment tout reconstruire, d’un replay à l’autre et surtout, avec qui ? 
Bien que la tentation soit grande, tant le récit abonde d’idées géniales et émouvantes, je n’en dirai pas plus. 

Publié en 1987, à une époque où foisonnent au cinéma les voyages temporels et les récits switch of age * bien garnis de paradoxes comiques, ce roman d’une grande force émotionnelle choisit de suivre la piste mélancolique et passionnelle. Avec brio. Le roman fut un best-seller immédiat et, après des années à naviguer d’une production à l’autre, une adaptation sera bientôt mis en scène par Zemeckis – oui, celui de Retour vers le futur.** 
Difficile d’imaginer que Guillaume Musso n’ait pas lu et aimé ce roman, tant le point de départ, l’orientation romance de l’intrigue et les interrogations « philosophiques » qu’induit le gimmick du retour en arrière se rapprochent de son travail***. Mais là où le Français privilégie les coïncidences foudroyantes, les twists et multiplie les rebondissements de l’intrigue, Grimwood installe un personnage aussi crédible qu’attachant, choisit un réalisme qui valorise l’intensité des trouvailles scénaristiques, opte pour un style sobre qui n’exclut pas les moments de grâce. 
Seul bémol : les ellipses, de plus en plus nombreuses et amples à mesure que le roman file vers la fin, ont peiné à me rendre l’intensité des toutes dernières vies du narrateur, à sentir, éprouver le long fil du temps. 

 Sachez enfin que Replay est, vous l’aurez compris, un véritable bijou. 

Alors qu’il s’attelait à l’écriture d’une suite, Grimwood est mort en 2003. D’une crise cardiaque, évidemment. 

 *Back to the Futur, Groundhog Day, Like Father like Son, Big, 18 Again, Vice Versa…
** On parle de Ben Affleck désormais.
*** Depuis la rédaction de cette note, j'ai appris que Guillaume Musso est un fervent admirateur de ce roman et son ardent prescripteur. Qu'il n'en fasse pas mystère, bien au contraire, est tout à son honneur.

lundi 9 janvier 2012

La Planète des singes : les origines





Imaginez un monde où l’on tenterait de soigner Alzheimer, où ça marcherait et que ça serait Mal. De la SF, non ?
Oui, si l’on considère les USA comme une pure contrée science-fictive. Car voilà, le héros du film, il est scientifique et il a trouvé un putain de remède pour soigner son papa malade de la tête. Même que le truc il marche tellement super fort que ça rend les singes, sur lesquels on l’expérimente d’abord, vachement plus intelligents que Nadine Mor… que la normale. Seulement c’est pas bien son remède, ça provoque des catastrophes en chaîne, voire la Big Cata, même l’héroïne vétérinaire elle lui dit : « Parfois, il faut laisser les choses comme elles sont ». Ma chérie, avec ton raisonnement on serait tous morts de maladie infectieuse depuis belle lurette et l’espérance de vie serait un gag qui circulerait en petite section de maternelle. Mais bon, passons sur le message des scénaristes et regardons les choses en face - j’aime bien donner mon avis façon Néron -, c’est un chouette film. Un poil long, mais chouette.
Le récit prend soin de montrer l’évolution vers la conscience de soi d’une créature, depuis sa plus tendre enfance jusqu’à l’adolescence et sa crise pubertaire. Apprentissage de l’attachement, de la séparation, vertige de la douleur, incompréhension d’une société humaine qui, sous la semblance du respect mutuel et des manières policée, s’avère bien cruelle… C’est la jungle, ma bonne dame. Puis, peu à peu, découverte de l’autonomie. Laquelle passera par un certain rejet de ceux-là mêmes qui l’ont permise. En somme, on est en plein récit d’initiation.
Comme souvent, la bande annonce ne rend pas hommage à un métrage plus psychologique qu’action movie : la destruction prévisible – après tout, on est là dans la prequel de La Planète des singes – n’est que le bouquet final et collectif d’une aventure plus individuelle, plus intime. À l’exception d’inévitables plans-séquences tourbillonnants avec créatures en pure peau de synthèse dedans, la mise en scène est plutôt sobre. La photographie est, elle aussi, sans surprise mais a le mérite de souligner l’histoire sans excès : le labo hi-tech est bleu, la maison du héros d’un jaune chaleureux et chez les méchants de la fourrière, on navigue entre vert et rouille. Au pupitre, Patrick Doyle fait le minimum syndical, déversant comme tout compositeur de blockbuster depuis quinze ans ses torrents de taikos et soufflant ses cuivres sans prendre soin d’inventer les thèmes qu’aurait pourtant autorisés le scénario. Mais tous les producteurs et réal n’ont pas l’obsession du « un thème, un personnage ». Dommage.
Malgré quelques options et plans pas toujours très heureux, vous allez adorer Cesar – moi c’est Néron, je vous ai dit –, l’antihéros chimpanzé joué par Andy Serkis, le gollum du Seigneur des Anneaux. Sa petite troupe de copains vous donnera la chair de poule, des frissons dans le dos aussi car il est impossible de prendre tout à fait partie pour les monkeys quand on sait le sort qui nous sera réservé, à nous autres pauvres humains, dans un avenir pas si lointain. (Sans doute est-ce d’ailleurs son voyage sur la Planete of Apes qui a convaincu Charlton Eston de défendre avec tant d’énergie les marchands d’armes de poing.) Applaudissements nourris donc pour ces singes expressifs et muets.
En revanche, les acteurs ne m’ont pas plus séduit que ça. Ligthow s’en sort honorablement, James Franco n’est jamais mauvais, Brian Cox cachetonne gentiment et Freida Pinto est…, euh… canon. Mais ça manque un peu de conviction, tout ça, et côté émotion, moi j’ai frisé le néant.

Bon, et maintenant que je sais comment l’humanité va disparaître, je peux aller dormir.

PS : Et tout ça se regarde bien mieux que la tentative de Tim Burton.

lundi 2 janvier 2012

Bored to death


Bored to death porte très mal son nom, et enchaîner les épisodes de 20mn ne m’a jamais tiré un bâillement. Sous la plume unique et singulière de Jonathan Ames, trois hommes, trois amis, auront connu les mésaventures les plus farfelues dans l’univers rassurant d’un Brooklyn bien léché. 
Le pitch ? Jeune romancier, Jonathan est sur le point de planter son 2nd roman et son couple. Il faut dire que le garçon touche un peu trop le vin blanc et l’herbe qui fait rigoler. A la recherche d’un job et d’expériences pour nourrir ses écrits et dépasser son désarroi conjugal, Jonathan s’improvise détective privé. Ses enquêtes franchement bouffonnes seront dès lors menées avec l’aide de deux amis aussi éloignés l’un de l’autre qu’un aigle peut l’être d’un paresseux : éditorialiste sur le déclin d’un magazine prestigieux, George est le prototype du vieux nanti, serial séducteur qui porte beau à l’approche de la soixantaine. Immature et colérique, Ray - Zach Galifianakis - dessine quant à lui un comics dont le héros possède comme superpouvoir une verge géante, catharsis d’un trentenaire puéril miné par de fréquentes crises d’impuissance ; père éprouvette d’un garçon élevé par un couple de lesbiennes, il s’épanouira enfin dans le lit de septuagénaires célibataires. Le plus banal reste le héros écrivain, un Jason Schwarzman dont les louables efforts parviennent tout juste à mettre en valeur la révélation de ces segments : Ted Danson. Parfaitement déjanté, inventif, lumineux, touchant parfois, Danson interprète un infatigable coucheur dénué de toute culpabilité et de tout moralisme, partageant avec ses deux acolytes une semblable immaturité, quand il ne leur vient pas en aide motivé par une loyauté sans faille.
Bien sûr, le prétexte hard boiled detective penche la série plutôt du côté du Woody Allen de Manhattan Murder Mystery que du Eastwood de Mystic River : Mêmes références arty, mêmes angoisses existentielles, même appréhension bobo de la vie, la fraîcheur liberal en plus. Ici, le trio passe son temps à fumer des joints, à parler de sexe, à courir après le temps avec une forme de nostalgie fébrile, le tout en menant des investigations plutôt minables et drôlatiques, flirtant avec l’absurde. Il faut passer l’écueil des deux premiers épisodes pour se laisser embarquer dans ce Brooklyn fantasque, où les trafiquants de chiens coexistent avec les fétichistes du costume en peluche. Ensuite opère le charme d’une amitié que tout menace et que rien ne brise. Hélas, HBO y a mis un terme, après 3 saisons de 8 épisodes. Voilà bien longtemps que la fin d’une série ne m’avait tant attristé.

dimanche 1 janvier 2012



Des jeux, des artoyz, des livres sur le cinéma que  j'aime : ce qui s'appelle un Noël de geek comblé.