samedi 6 août 2011

Une Patience d'ange - Le Projet Bleiberg





Tandis que l'occident court à sa perte, court après ses pertes devrais-je dire, je poursuis mes lectures avec un sourire béat. Elizabeth George, parce que je viens de passer son manuel d'écriture au crible. Avec Une Patience d'ange. Le genre de patience qu'il m'aura fallu pour venir à bout de 750 pages de porte à porte, d'interrogatoires placides, d'allers-retours en Bentley entre les landes du Derbyshire et Londres. My Lord, tout ça n'était guère passionnant. C'est pas du policier, c'est du policé.

Américaine, George se passionne pour une Angleterre confite dans les clichés : brume et sordidité. Certes, elle passe du temps auprès de ses personnages, touille inlassablement leurs motivations. Au moins, en voilà qui ne poussent pas des gueulantes façon sauvageons, un travers de plus en plus fréquents chez les auteurs de littérature populaire. Pa-tien-ce, je vous dis.
La révélation du meurtrier - oui, il y a eu des meurtres, voyez-vous, enfin non vous ne les verrez pas - tombe un peu à plat. Faut dire qu'on n'aura guère eu le temps de s'attarder sur le bonhomme ni sur la profondeur de son mobile. J'imagine que le bad guy l'intéresse moins que les tribulations affectives et conjugales de ses protagonistes principaux.
Bon, l'effet de réel est bel et bien présent dans ce
police procedural, sauf que je ne suis pas certain de rechercher tout à fait ce genre d'émotions, en ce moment.

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Le Projet Bleiberg juste après ça c'est passer du coq à l'âne. Du mystery policé au thriller décomplexé. Du salon de thé au timbré du dojo. En un livre, David S. Khara a tout compris au fun et à la légèreté de la littérature de genre. Un peu trop, parfois : j'ai plus souvent eu le sentiment de foncer, pied au plancher, au travers d'un comic que de m'immerger dans une intrigue noire à souhait. Rapide, donc, à l'image de sa vie, quoi : Khara n'a pas de temps à perdre. Que voulez-vous, il faut faire des choix dans la life, et il faut les faire vite. Et jusqu'à présent, ça lui réussit plutôt bien, croyez-moi. *
En 240 pages, il déroule une intrigue de fin du monde, avec savant fou, services secrets et secrets de famille. Ça défouraille façon série B. On ne s'attache jamais mais on ne s'ennuie pas. Reste que pour un format aussi court, Khara installe une documentation puis la développe, la triture, avec un entrain, une concision qui forcent l'admiration. En tout cas la mienne. Bon sang, ce garçon n'en est qu'à son 2e roman ! On a beaucoup parlé de l'humour de son style. Je ne suis pas fan des chapitres à la 1ère personne, cette gouaille d'un improbable trader m'a plus tiré hors du roman qu'elle ne m'y a accroché. Tant pis pour moi. En revanche toutes les scènes qui nous propulsent au plus sombre du XXe siècle sont pleines de brio et d'émotion. Chapeau.
A paraître en octobre :
Le Projet Shiro. Toujours aux éditions Critic. Je crois bien qu'Eytan Morg va reprendre du service. Tant mieux !

*Le livre est aussi un phénomène d'édition : publié par un micro-éditeur (en gros un libraire rennais dont c'était alors le 3e titre) il a atteint 25 000 ventes en une saison. Les droits ont été achetés par le cinéma, vendus en poche, à l'étranger... Ancien patron d'une boîte de com qui comptait un groupe automobile japonais parmi ses clients, David S. Khara est un personnage de roman à lui tout seul. Vous n'avez pas besoin de moi pour lire son 1er roman, publié au départ chez Rivière Blanche et repris au printemps par Michel Lafon : Les Vestiges de l'aube.

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