mardi 27 août 2013

Juliet, naked - Nick Hornby - éditions 10:18



De quoi ça parle ?

Description de l’éditeur : Que fait-on lorsqu’on pense avoir gâché quinze ans de sa vie ?
C’est la question gênante que se posent tous les personnages du nouveau roman de Nick Hornby. Il y a Annie et Duncan, la quarantaine sonnante, dont le couple de quinze ans d’âge montre d’inquiétantes fissures. Rien d’étonnant, car à y regarder de près, on ne sait plus très bien pourquoi ils sont ensemble.

Annie travaille au petit musée local de Gooleness, un job peu honorifique qui lui laisse assez de temps pour une visite hebdomadaire à son psy débutant. Mais le temps justement est devenu son pire ennemi.
Ado attardé, Duncan consacre tout le sien à Tucker Crowe, une rock star américaine qui a disparu des radars de la scène depuis près de 20 ans, après un album à succès. Il lui a dédié un site et passe ses journées à échafauder avec une communauté de fans internautes les théories les plus farfelues sur la vie de ce Salinger rock et sa réclusion sonique. Quand Duncan reçoit d’un producteur la démo de son nouvel album acoustique, Juliet Naked…c’est l’instant critique. 


C’est comment ?
Vous descendez ? le précédent Hornby*, était un chef d’œuvre d’humanité et de style, l’improbable collision de quatre destins sauvés in extremis de la chute littérale et figurée par la simple coïncidence de leur rencontre. Juliet, naked, n’atteint guère ce sommet – en béton – même s’il évoque aussi trois vies à l’orée d’un changement.
La mélancolie aussi aigre qu’un fond de bouteille redécouvert deux semaines après l’ultime party, offre là encore l’une des principales saveurs. Oui, ça pique. Mais bien que présent, l’humour y est plus rare, et le fou-rire absent. Si vous pensiez que la trentaine finissante était une période bénie, vous autres pauvres quinqua bobos et désabusés après tant de promesses non tenues, y compris celles que vous vous étiez faites, revoyez votre jugement : la douleur de l’auto-déception n’attend pas. Et Internet n'y changera rien, que vous passiez ou non votre temps à partager votre passion - obsession ? - avec d'autres gentils allumés sur un forum dédié à votre star méconnue et désormais aussi mystérieuse, muette et absente  qu'un Pynchon.
Ou bien Hornby la jouerait-il encore plus subtil ? On le dit, le web ne serait après tout qu'un miroir de notre société, de nos obsessions, de nos comportements. Souvent amplifiés, parfois déformés. Annie trouvera ainsi le chemin d'une certaine rédemption via la fameuse mailing list à laquelle son ennuyeux compagnon est abonné et dont il est l'un des plus fidèles et teigneux animateurs. 
A deux doigts du désespoir et donc d’une lecture déprimante, Hornby décide en effet d’infléchir la courbe. Sa bien connue générosité envers ses personnages est telle, après tout, qu’il ne les laissera pas en plan au fin fond d’une station balnéaire anglaise sans leur donner un coup de pouce. Mais ne vous attendez pas à un improbable happy end : Hornby n’écrit pas pour les petits nenfants à rassurer avant d’éteindre la lumière, pas même lorsqu'il donne dans le roman ado - voir son très réussi Slam.


Tel un pansement stomacal posé avec tendresse pour apaiser l’aigreur d’un fiasco conjugal annoncé, l’auteur résout les crises sans modifier vraiment le régime de base – après tout, qui peut prétendre changer radicalement ses goûts du jour au lendemain ? Et donne une leçon d'écriture à tous ceux qui cherchent à exprimer les doutes, les déconvenues d'une classe un peu trop éprise d'elle-même.

*du moins pour les adultes, Slam, roman jeunesse mettant en garde les ados sur les conséquences des rapports sexuels non protégés, lui étant postérieur en France.

Traduit par Christine Barbaste

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