lundi 27 janvier 2014

Le Prisonnier du ciel - Carlos Ruiz Zafon - traduction de François Maspero


Zafon poursuit sa description historico-fantastique de Barcelone avec cet ouvrage où l'on retrouve à la fois le narrateur du Vent de l'ombre et celui du Jeu de l'ange. Et plus encore... Deux protagonistes prennent la parole : le jeune libraire Daniel Sempere et son ami, clochard magnifique sauvé de la rue et de la vindicte policière, Fermin Romero de Torres. Car ce dernier porte un lourd secret, lequel donne un sens très particulier à sa rencontre sans doute pas si fortuite que cela avec le jeune héros du Vent de l'ombre.

Pour dénouer l'énigme de cette histoire, il lui faudra donc puiser dans le souvenir de ces mois entre parenthèses passés dans les geôles de l'ignoble Montjuic. Un lieu de souffrances et d'abus où il fit jadis la connaissance d'un détenu bien connu des lecteurs de Zafon, son personnage le plus tourmenté – je vous laisse découvrir lequel.

Le récit est ici franchement plus court, moins foisonnant que lors des deux précédents romans. Moins passionnant aussi. On y retrouve pourtant les mêmes ingrédients : la cité gothique à souhait, le rôle prégnant de la littérature sur une galerie de personnages veules, excessifs, téméraires ou sadiques, les violences politico-policières, l'emphase parfois désuète du style, les énigmes ancrées dans le passé et qui condamnent le présent au feu des non-dits, des remords et du ressentiment.
Quant à la romance, elle a à peu près déserté les cieux toujours fuligineux de Zafon : le mariage de Daniel est certes un peu malmené le temps de quelques pages, les noces de Fermin incertaines durant une poignée de chapitre mais c'est tout. Pourquoi pas ? Je n'ai rien contre un peu de changement, bien au contraire.

Le vrai héros de cet opus est sans conteste Fermin. Son ubiquité à travers le récit permet au romancier de laisser libre court à sa faconde superbe, entre grossièreté et lyrisme, scatologie et leçons de morale, le tout enveloppé dans le cynisme. Un pur régal que rend avec une belle invention François Maspero, le traducteur. 

Au final, l'ensemble m'a donné à la fois le sentiment d'une redite au souffle court et d'une plaisante excursion en compagnie de compagnons aimés. Une balade sombre – Montjuic – et drolatique – le mariage de Fermin – dont on aurait tout de même tort de se priver au prix d'une édition poche.

0 commentaires: